Modéliser le cerveau avec des « briques de Lego »
![]() ![]() ![]() ![]() Publié le jeudi 15 juin 2017
Des chercheurs de l'Université du Luxembourg, en coopération avec l'Université de Strasbourg, ont mis au point une méthode de calcul qui pourrait guider les chirurgiens pendant les opérations du cerveau. Les chirurgiens opèrent souvent dans l'obscurité. Ils ont une vue limitée de la surface de l'organe et ne parviennent généralement pas à voir ce qui se cache à l'intérieur. Des images de qualité peuvent systématiquement être prises avant l'opération, mais dès lors que celle-ci commence, l'emplacement des zones cibles et à risque que le chirurgien doit éviter change constamment. Les praticiens doivent ainsi se fier à leur expérience lorsqu'ils utilisent des instruments chirurgicaux pour, par exemple, retirer une tumeur sans endommager le tissu sain ou sectionner d'importantes voies sanguines. Un nouvel outil de simulation chirurgicaleStéphane Bordas, professeur de mécanique numérique à la Faculté des Sciences, de la Technologie et de la Communication de l'Université du Luxembourg, et son équipe ont mis au point des méthodes visant à former les chirurgiens, à les aider à s'entraîner pour des opérations complexes et à les guider pendant les interventions. Pour ce faire, l'équipe a développé des modèles mathématiques et des algorithmes numériques permettant de prévoir la déformation de l'organe pendant l'opération et de fournir des informations sur l'emplacement réel des zones cibles et vulnérables. Grâce à ces outils, le praticien peut s'exercer virtuellement à effectuer une opération particulière afin d'anticiper des complications potentielles.
Sachant que le cerveau est une matière composite faite de matière grise, de matière blanche et de fluides, les chercheurs utilisent des données issues d'imagerie médicale, telles que des imageries par résonance magnétique (IRM), pour décomposer le cerveau en sous-volumes, similaires à des pièces de Lego. La couleur de chacune d'elles dépend de la matière qu'elle représente : blanche, grise ou fluide. Ce « cerveau numérique en Lego » à code couleur se compose de milliers de ces pièces interactives et mobiles qui sont utilisées pour calculer la déformation de l'organe subissant une opération. Plus les chercheurs utilisent de pièces pour modéliser le cerveau, plus la simulation est précise, bien que cela ralentisse la vitesse de traitement, puisque la puissance de calcul requise est plus importante. Pour l'utilisateur, il est donc indispensable de trouver le bon équilibre entre précision et vitesse lorsqu'il décide du nombre de pièces à utiliser. Les travaux du professeur Bordas sont cruciaux, puisqu'ils permettent, pour la toute première fois, de contrôler à la fois la précision et le temps de calcul des simulations. « Nous avons développé une méthode qui offre un gain de temps et d'argent à l'utilisateur, en lui indiquant la taille minimum que ces pièces de Lego doivent avoir pour garantir un niveau de précision donné. Par exemple, nous pouvons affirmer avec certitude que si une marge d'erreur de 10 % est acceptable, alors vos pièces de Lego doivent mesurer au maximum 1 mm. Si une marge de 20 % est acceptable, alors vous pouvez utiliser des pièces de 5 mm », explique-t-il. « Cette méthode présente deux avantages : vous pouvez estimer la qualité et concentrer l'effort de calcul requis uniquement sur les zones cibles, ce qui permet d'économiser un temps de calcul précieux. » Accompagner les chirurgiens lors des interventionsLes chercheurs ont désormais pour objectif de fournir aux chirurgiens une solution qu'ils peuvent utiliser pendant les interventions, de façon à mettre constamment à jour le modèle de simulation en temps réel à l'aide des données du patient. Toutefois, selon le professeur Bordas, il faudra encore un certain temps avant d'en arriver là. « Nous devons développer des méthodes plus robustes pour évaluer le comportement mécanique de chaque pièce de Lego représentant le cerveau. Nous devons également mettre au point une plate-forme conviviale que les chirurgiens peuvent tester pour nous dire si notre outil leur est utile », confie-t-il. - - - © Michel Brumat / Legato Team / Université du Luxembourg |
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