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Une piste intéressante pour la médecine régénérative

  • Université / Administration centrale et Rectorat
    27 juillet 2018
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    Université

Grâce au développement d’une nouvelle méthode informatique, des chercheurs luxembourgeois sont à même de prédire avec précision comment un sous-groupe de cellules peut se métamorphoser en un autre.

« Ce processus revêt un potentiel important pour la médecine régénérative, lorsqu’il s’agit par exemple de remplacer une sous-population de cellules détruites au cours de la maladie », explique le Prof. Antonio del Sol, qui dirige le groupe Computational Biology du Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB) de l’Université du Luxembourg. En coopération avec des chercheurs spécialistes de la maladie de Parkinson à l’institut suédois Karolinska, les scientifiques ont réalisé des tests pour s’assurer que cette méthode fonctionne dans la pratique. Ils ont démontré que, sur la base de leurs prédictions informatiques, il est possible de reprogrammer des cellules souches du cerveau et d’induire ensuite leur transformation vers le sous-type souhaité de cellule nerveuse. Les chercheurs présentent leurs résultats dans la revue spécialisée « Nature Communications ».

Agir sur les gènes régulateurs

Il va sans dire que les cellules de la peau diffèrent des cellules nerveuses. Mais même au sein de types définis de cellules, il existe de légères différences en termes d’activité génétique qui ont, dans certains cas, une influence considérable sur la fonction des cellules. C’est ainsi qu’apparaissent différents sous-types ou sous-populations de cellules. À titre d’exemple, les neurones dopaminergiques sont des cellules nerveuses du cerveau qui produisent un neurotransmetteur, la dopamine. La maladie de Parkinson mène à la destruction progressive de ces cellules situées dans la substance noire du cerveau moyen, mais elles ne sont pas toutes touchées : seul un sous-type de ces cellules est concerné. « L’identité de chaque sous-type de cellule est définie et maintenue par l’interaction d’un petit nombre de gènes régulateurs », continue Antonio del Sol. « Néanmoins, les différences entre les sous-types sont subtiles et difficiles à reconnaître à l’aide des méthodes d’analyse dont nous disposions jusqu’ici. »

Des prédictions vers des stratégies

Pour remédier à cette situation, le professeur del Sol et son équipe ont développé la plateforme informatique TransSyn. Ses prédictions se basent sur des données portant sur l’expression des gènes dans certaines cellules de la population. Un processus à plusieurs étapes permet à TransSyn de rechercher d’infimes différences entre des sous-types de cellules. Les chercheurs savent que c’est l’effet synergique de plusieurs gènes régulateurs interagissant ensemble qui va définir le sous-type d’une cellule. On parle de groupes de « facteurs de transcription ». Une fois que ces groupes ont été identifiés, il est possible d’utiliser ces données pour des applications en laboratoire, comme par exemple la transformation d’un sous-type de cellule en un autre. Pour ce faire, les chercheurs traitent des cultures cellulaires avec des facteurs spécifiques qui vont modifier l’expression des gènes. Ces substances activent certains gènes et en désactivent d’autres.

En se basant sur les prédictions obtenues par les chercheurs luxembourgeois, l’équipe de l’Institut Karolinska a réussi à transformer des cellules souches neuroépithéliales du cerveau postérieur en cellules progénitrices des neurones dopaminergiques du cerveau moyen. Ces dernières peuvent ensuite devenir des neurones dopaminergiques à part entière. « Cela pourrait mener vers une stratégie de thérapie cellulaire pour la maladie de Parkinson », explique Antonio del Sol.

Tester des prédictions en laboratoire

À l’heure actuelle, l’équipe luxembourgeoise continue d’évaluer la pertinence des résultats obtenus grâce à la plateforme, notamment dans le cadre d’une coopération avec l’Institut Gladstone aux États-Unis. Sur place, un groupe de scientifiques mené par Deepak Srivastava cherche à développer une méthode efficace pour transformer les cellules cardiaques du ventricule droit en cellules du ventricule gauche et vice-versa : dans ce cas également, il existe d’infimes différences dans le profil d’expression génétique des deux sous-types qui se répercutent sur leur activité fonctionnelle. « Nos prédictions sont prêtes. Nos collègues des États-Unis vont commencer leurs expériences dans les prochaines semaines. »

Article : S. Okawa et al. : Transcriptional synergy as an emergent property defining cell subpopulation identity enables population shift. Nature Communications, DOI : 10.1038/s41467-018-05016-8