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Un modèle informatique novateur au service du traitement du cancer

  • Faculté des Sciences, des Technologies et de Médecine (FSTM)
    Université / Administration centrale et Rectorat
    02 juillet 2019
  • Catégorie
    Recherche, Université
  • Thème
    Sciences de la vie & médecine

Les chercheurs de l’unité de recherche en Sciences de la Vie (LSRU) de l’Université du Luxembourg ont développé un modèle informatique qui simule le métabolisme des cellules cancéreuses. Ils ont utilisé ce programme pour étudier comment les associations de médicaments peuvent être utilisées plus efficacement pour empêcher la croissance des tumeurs. Les biologistes ont publié leurs conclusions dans la revue scientifique EBioMedicine du prestigieux groupe éditorial Lancet.

De g. à d. : Dominik Ternes, Elisabeth Letellier, Tamara Bintener and Thomas Sauter

Le métabolisme des cellules cancéreuses est optimisé pour favoriser la croissance rapide des tumeurs. « Leur métabolisme est plus allégé que celui des cellules saines, car les cellules cancéreuses n’ont qu’un seul objectif : se développer. Toutefois, cela les rend plus vulnérables aux interruptions dans la chaîne des réactions chimiques dont elles dépendent. Alors que des cellules saines peuvent emprunter d’autres routes lorsqu’une voie métabolique est hors d’usage, c’est beaucoup plus difficile pour des cellules cancéreuses », explique Thomas Sauter, Professeur en biologie systémique à l’Université du Luxembourg et auteur principal de l’article. « Au cours de notre étude, nous nous sommes penchés sur la façon dont les médicaments ou les associations de médicaments pouvaient être utilisés pour désactiver certaines protéines présentes dans les cellules cancéreuses et ainsi interrompre le métabolisme de ces cellules. »

Modèles numériques de cellules saines et cancéreuses

Les chercheurs ont donc créé des modèles numériques de cellules saines et de cellules cancéreuses et les ont alimentées de données de séquences génétiques provenant de 10 000 patients du Cancer Genome Atlas (American National Cancer Institute) de l’TCGA (NCI). En utilisant ces modèles, les chercheurs ont pu simuler les effets de différentes substances actives sur les métabolismes des cellules et ainsi identifier les médicaments qui inhibaient le développement du cancer sans pour autant affecter les cellules saines. Les modèles permettent d’éliminer les médicaments qui ne fonctionnent pas ou sont toxiques, afin que seuls les plus prometteurs soient testés en laboratoire.

Grâce à ces modèles, ils ont testé près de 800 médicaments, parmi lesquels 40 devaient empêcher la croissance des cancers. Environ 50 pour cent de ces médicaments étaient déjà connus pour être des produits thérapeutiques anticancéreux, mais 17 d’entre eux sont à ce jour uniquement autorisés pour d’autres traitements. « Notre outil peut contribuer à ce que l’on appelle le repositionnement des médicaments, c’est-à-dire à trouver de nouvelles fins thérapeutiques à des médicaments existants. Cela pourrait réduire considérablement le coût et les délais du développement de médicaments », ajoute Prof. Sauter.

L’avantage tout particulier de cette approche réside dans l’efficacité de sa méthode mathématique. « Nous avons réussi à créer 10 000 modèles patients en une semaine, sans utiliser de système de calculs à haute performance. C’est particulièrement rapide », précise le Dr Maria Pacheco, chercheure postdoctorale à l’Université du Luxembourg et première auteure de l’étude. Le Dr Elisabeth Letellier, chercheure principale au sein du groupe Molecular Disease Mechanisms (MDM) à l’Université du Luxembourg et collaboratrice de la présente étude, souligne : « À l’avenir, cela pourrait nous permettre de créer des modèles de patients cancéreux donnés et de tester virtuellement des médicaments afin de trouver l’association la plus efficace. Cela pourrait également donner un nouvel espoir aux patients pour lesquels les traitements connus se sont avérés inefficaces. »

Jusqu’ici, les modèles ont été testés uniquement pour le cancer colorectal, mais, selon Thomas Sauter, l’algorithme fonctionne aussi en substance pour toutes sortes de cancers. Avec son équipe, il envisage à présent de développer des applications commerciales de cette méthode.

Lien vers la publication: “Identifying and targeting cancer-specific metabolism with network-based drug target prediction“, EBioMedicine, May 2019

Photo : © iStock