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Les mouvements de la souris révèlent votre comportement

  • Faculté des Sciences, des Technologies et de Médecine (FSTM)
    Université / Administration centrale et Rectorat
    22 juin 2021
  • Catégorie
    Université

Dans deux articles de recherche récemment publiés, des informaticiens de l’Université du Luxembourg et des partenaires internationaux révèlent comment les mouvements de souris peuvent être utilisés pour en savoir davantage le comportement de l’utilisateur. Alors que ceci peut amener à des applications nombreuses et intéressantes, les mouvements de la souris peuvent également révéler des informations privées sur les utilisateurs, comme leur âge ou leur sexe. Les chercheurs lancent un appel d’alerte sur les éventuels problèmes de confidentialité et ont proposé des mesures pour les limiter.

Le Prof. Luis Leiva de l’Université du Luxembourg, auteur correspondant des deux publications, explique plus en détail les principales conclusions.

Ma souris, mes règles

« Nous avons démontré qu’il est simple de collecter des données comportementales sur les utilisateurs à grande échelle. Ceci est possible en suivant discrètement les mouvements du curseur de leur souris et en prédisant les informations démographiques de l’utilisateur avec une précision raisonnable, le tout en utilisant cinq lignes de code. Pendant des années, enregistrer des mouvements de souris sur des sites internet a été facile, mais pour les analyser, il fallait disposer d’une expertise avancée en informatique et en apprentissage automatique. Aujourd’hui, il existe de nombreuses bases de données et infrastructures qui permettent à quiconque ayant un minimum de connaissances en programmation de créer des classifieurs assez sophistiqués. Cela soulève de nouveaux problèmes de confidentialité et les utilisateurs ne sont pas en mesure de faire valoir leur droit d’opposition ou de retrait facilement. »

Sur base des résultats, l’équipe a développé une méthode pour empêcher le suivi de la souris en déformant les coordonnées de cette dernière en temps réel. « Cette méthode s’inspire de recherches récentes dans l’apprentissage automatique contradictoire, et a été mise en œuvre en tant qu’extension de navigateur internet (« web browser extension »), afin que tout utilisateur puisse en bénéficier dans la pratique », explique Luis Leiva. L’extension du navigateur Webappelée MouseFaker est disponible sur Github. 

Ce travail a été présenté lors de la 6e Conférence ACM SIGIR sur l’interaction et la récupération des informations humaines.

Le choix : une étape qui en dit long

Néanmoins, le suivi par souris a des applications tpratiques pour les administrateurs de sites et pour les moteurs de recherche. Le Dr Ioannis Aparakis de Telefonica Research, co-auteur des deux publications, clarifie : « Lorsque vous recherchez quelque chose sur Google ou Bing, les mouvements de votre souris envoient un signal minuscule au moteur de recherche indiquant si vous êtes intéressé ou non par le contenu qui vous a été affiché. Comme le suivi de la souris peut poser des problèmes de confidentialité, nous avons étudié la possibilité d’enregistrer seulement une petite partie de la trajectoire du mouvement, pour voir si nous pouvons toujours déduire comment les individus font des choix lorsqu’ils font des recherches sur le Web. »

L’équipe a analysé trois scénarios représentatifs dans lesquels les utilisateurs devaient faire un choix sur les moteurs de recherche internet : lorsqu’ils remarquent une publicité, lorsqu’ils abandonnent la page et lorsqu’ils sont contrariés. Les résultats sont intéressants : si les utilisateurs prêtent attention à une publicité, cela sera signalé par les mouvements initiaux de la souris. En cas d’abandon de page, c’est en fait le contraire : les derniers mouvements indiquent si l’utilisateur a décidé de quitter l’application, qu’il soit satisfait des résultats de recherche ou non, sans avoir à cliquer sur quelque chose. Si l’utilisateur est contrarié, les résultats sont mitigés. Toutefois, il est apparu que la partie centrale de la trajectoire de mouvement de la souris fournissait plus d’informations que les parties initiales ou finales.

Les chercheurs ont découvert qu’il est possible de prédire les tâches susmentionnées en utilisant parfois seulement 2 ou 3 secondes de mouvement de la souris. Par conséquent, ils en concluent qu’en ne suivant que les parties intéressantes, les moteurs de recherche pouvaient obtenir des informations utiles et améliorer leurs services tout en respectant la vie privée des utilisateurs.

Ce travail sera présenté lors de la 44e Conférence internationale ACM SIGIR sur la recherche et le développement dans le domaine de la récupération des informations.

Enfin, comme l’explique le Prof. Leiva, « en enregistrant efficacement la bonne quantité de données de mouvement, nous pouvons économiser un débit et un stockage précieux, respecter la confidentialité de l’utilisateur et augmenter la vitesse à laquelle les modèles d’apprentissage automatique peuvent être améliorés et déployés. En tenant compte de l’échelle du Web, cela aura des répercussions positives non négligeables sur notre environnement. »

Publications

L. A. Leiva, I. Arapakais, C. Iordanou. My Mouse, My Rules: Privacy Issues of Behavioral User Profiling via Mouse Tracking, Proceedings of ACM SIGIR Conference on Human Information Interaction and Retrieval, DOI: 10.1145/3406522.3446011

L. Brückner, I. Arapakis, L. A. Leiva. When Choice Happens: A Systematic Examination of Mouse Movement Length for Decision Making in Web Search, Proceedings of the International ACM SIGIR Conference on Research and Development in Information Retrieval (SIGIR), DOI:10.1145/3404835.3463055