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Glaner et faire fructifier les données sur le métabolisme humain

  • Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB)
    Scienteens Lab
    Université / Administration centrale et Rectorat
    13 novembre 2018
  • Catégorie
    Université
  • Thème
    Sciences de la vie & médecine

Le LCSB lance une base de données en libre accès regroupant les connaissances sur le métabolisme humain.

Un consortium international mené par le Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB) de l’Université du Luxembourg a développé une base de données unique au monde baptisée « Virtual Metabolic Human Database » (VMH). VMH regroupe un ensemble de connaissances sur le métabolisme humain générées par des chercheurs du monde entier au cours des 60 dernières années.

Prof. Dr Ines Thiele, à la tête du groupe de recherche Molecular Systems Physiology du LCSB, est responsable de ce projet. Son équipe, en collaboration avec des partenaires français, néerlandais et indiens, a collecté et organisé de façon systématique les données existantes sur le métabolisme, certaines maladies, la flore microbienne du système digestif et la nutrition. Les chercheurs ont ensuite combiné les connaissances accumulées avec des modèles informatiques très complets représentant le fonctionnement du métabolisme humain. VMH est en libre accès, ce qui signifie que ces résultats issus de travaux de recherche financés par des fonds publics sont devenus accessibles à tous. « De cette façon, chaque détail de la recherche sur le métabolisme n’est qu’à un clic de n’importe quel chercheur dans le monde » explique Ines Thiele. La revue scientifique Nucleic Acids Research a publié le 29 octobre un article sur ce projet dans sa section « breakthrough ».

Peu de maladies humaines ont une cause unique, comme une seule mutation génétique. La plupart du temps, il y a au contraire de multiples facteurs internes et externes qui entrent en jeu. C’est particulièrement le cas pour des maladies complexes telles que les cancers ou les maladies de Parkinson et d’Alzheimer. Si les chercheurs ont découvert au fil du temps de nombreux détails sur le fonctionnement des maladies, « jusqu’ici ce savoir était dispersé entre différents articles et bases de données scientifiques » souligne Ines Thiele. « Même pour des spécialistes, il devient difficile d’avoir une vision globale. » Sauf si des résultats sont publiés en même temps ou dans la même revue, il est difficile d’établir des liens entre eux : cela demande du temps et beaucoup d’effort. C’est ce qu’une base de données comme VMH va changer.

Une base de données unique sur le métabolisme humain

Avec le lancement de VMH, le consortium mené par Ines Thiele voit la conclusion, temporaire, d’une tâche herculéenne. Pendant cinq ans, les chercheurs ont rassemblé les données disponibles dans les publications et le bases de données scientifiques dans le domaine du métabolisme. Ces données ont dû être traitées, préparées afin d’être compatibles et utilisables au sein de VMH. L’équipe a aussi développé un outil baptisé Nutrition Designer pour les informations portant sur la nutrition. Il permet de simuler ce qui se passe au niveau du métabolisme en se concentrant sur les liens avec le régime alimentaire. « C’est quelque chose de complètement nouveau et d’assez chouette » indique Ines Thiele. Tout cela a été rendu possible grâce à différents financements, le programme ATTRACT du Fonds National de la Recherche du Luxembourg (FNR) et la bourse « ERC starting grant » obtenu par le professeur Thiele, ainsi que via le projet NCER-PD également financé par le FNR.

De jeunes étudiants ont contribué au projet

Un autre aspect de ce projet est aussi très spécial : des lycéens et des étudiants ont participé à la création de la base de données. « L’année dernière, nous avons organisé une école d’été avec le Scienteens Lab de l’université du Luxembourg » explique Prof. Dr Ronan Fleming de l’Université de Leiden au Pays-Bas, précédemment responsable du groupe Systems Biochemistry au LCSB et partenaire de ce projet. « Au cours de leur stage, les lycéens et étudiants ont travaillé ensemble pour préparer des données pour VMH et pour permettre de les visualiser au sein de ce qui s’apparente à une carte Google du métabolisme humain. » Même si la plupart d’entre eux avaient peu ou pas d’expérience scientifique, ils ont fortement contribué et, comme Ronan Fleming le souligne : « tous ceux qui ont travaillé sur ce projet sont donc cités en tant que co-auteurs de l’article scientifique. »

L’équipe du projet MitoCarte – The MitoCarte team

Un outil performant pour la recherche biomédicale

VMH va faciliter la recherche biomédicale, Ines Thiele en est convaincue : « notre base de données révèle des connections cachées entre le métabolisme humain et celui de la flore microbienne intestinale. » C’est important entre autres pour le développement des principes actifs des médicaments. Il est par exemple maintenant possible de découvrir si une substance destinée à combattre une maladie pourrait perturber des bactéries du système digestif importantes pour notre métabolisme. Ines Thiele continue : « en un clic, VMH me dit si le processus métabolique ou la protéine ciblé par le principe actif est aussi présent chez une des bactéries. » Utiliser cette information pour modifier le principe actif en conséquence, pourrait permettre d’éviter des effets secondaires par exemple.

Pour les chercheurs impliqués, le lancement de la plateforme VMH ne signifie pas la fin du travail comme l’explique Ines Thiele : « nous devons intensifier nos efforts afin de maintenir VMH à jour avec les derniers résultats scientifiques et en faire un outil vraiment efficace pour la recherche biomédicale. » La prochaine étape est de trouver des financements afin de pouvoir engager plus de scientifiques et de programmeurs. « Maintenant que VMH est en ligne, nous allons recevoir des conseils de la part de nos collègues et ils vont nous diriger vers des données supplémentaires. L’intégration de ces nouvelles informations dans VMH va demander du travail. » À terme, le professeur Thiele envisage de faire de VMH un outil de simulation et de prédiction. « Il sera alors possible d’analyser encore plus d’aspects du métabolisme humain et de notre environnement, et éventuellement de faire des prédictions personnalisées, c’est-à-dire pour un patient particulier, à partir du moment où les données correspondantes existent. »

Financements :

Cette étude a reçu des financements du Fonds National de la Recherche (FNR) via le programme ATTRACT (FNR/A12/01), le programme CORE (C16/BM/11332722), la bourse OPEN (FNR/O16/11402054), le National Centre of Excellence in Research on Parkinson’s disease (NCER-PD), H2020 le programme-cadre de l’Union européenne pour le recherche et l’innovation (convention de subvention N. 668738), et le Conseil européen de la recherche (dans le cadre du programme H2020, convention de subvention N. 757922). L’étude a également reçu le généreux soutien de l’ASBL Art2Cure pour la production de ReconMaps.

Bibliographie :

Alberto Noronha, Jennifer Modamio, Yohan Jarosz, Elisabeth Guerard, Nicolas Sompairac, German Preciat, Anna Dröfn Daníelsdóttir, Max Krecke, Diane Merten, Hulda S Haraldsdóttir, Almut Heinken, Laurent Heirendt, Stefanía Magnúsdóttir, Dmitry A Ravcheev, Swagatika Sahoo, Piotr Gawron, Lucia Friscioni, Beatriz Garcia, Mabel Prendergast, Alberto Puente, Mariana Rodrigues, Akansha Roy, Mouss Rouquaya, Luca Wiltgen, Alise Žagare, Elisabeth John, Maren Krueger, Inna Kuperstein, Andrei Zinovyev, Reinhard Schneider, Ronan M T Fleming, Ines Thiele; The Virtual Metabolic Human database: integrating human and gut microbiome metabolism with nutrition and disease, Nucleic Acids Research, gky992, https://doi.org/10.1093/nar/gky992